mardi 25 décembre 2007

D'un coté les assis...


En ce jour de Noël, Candide retient de sa lecture les pensées suivantes :
"D'un coté les assis ; les satisfaits ; les surs d'eux et de leur place; ceux qui ne doutent de rien et surtout pas leur légitimité à être ce qu'ils sont ; ceux qui, par conséquent, ne sont que très rarement effleurés par l'idée qu'ils puissent être coupables de quoi que ce soit - alors à plus forte raison d'un crime commis par quelqu'un d'autre : très exactement ce que Jean Paul Sartre appelait les salauds.
De l'autre ceux qui, se souvenant de Primo Levi et de sa "honte d'être un homme", pensent qu'il y a une certaine dose de honte ou, en tout cas, d'humilité, sans quoi la condition humaine perdrait de sa dignité. Je ne peux pas, estiment ceux-là, ne pas ressentir une forme de mainmise à être cet homme-ci, ou celui-là, car je n'ai pu l'être qu'au détriment de ce troisième - sans doute n'ais-je rien fait; peut-être ne suis-je coupable de rien ; je suis méritant, vertueux, généreux, soucieux de mon prochain, bon militant, bon citoyen ; mais je vis avec la désagréable mais infaillible arrière-pensée que cette place que j'occupe, ces biens dont je jouis et qui font ma prospérité, cet air que je respire, cette démarche qui est la mienne, ces songes, ce sommeil paisible, j'en ai, un peu, privé autrui.
[ BHL dans "Ce grand cadavre à la renverse"]

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